La plantation d’un pacanier permet de rendre hommage à l’idéalisme humanitaire des philosophes des lumières et aux hommes qu’ils ont inspiré pour conduire, à travers guerres et révolutions, les nations atlantiques aux régimes parlementaires que nous connaissons aujourd’hui.
C’est en effet sous le nom de « Révolution atlantique » que deux historiens, Robert Palmer et Jacques Godechot, ont voulu montrer l’unité de ce vaste mouvement d’émancipation qui se développe du XVII° siècle en Angleterre et jusqu’aux colonies sud-américaines au XIX° siècle.
La guerre d’indépendance américaine est l’épisode qui nous intéresse particulièrement ici, mais il faut en rappeler les origines et les conséquences. La racine profonde de ce mouvement est la Réforme qui a fait surgir les droits de la Conscience individuelle face à la puissance des Etats et de l’Absolutisme.
Rappelons aussi l’invention de l’imprimerie qui a, au même moment, facilité la circulation des idées. C’est ensuite Thomas Hobbes qui a revendiqué le droit naturel des hommes à se gouverner par la Raison, puis surtout John Locke (Second traité du gouvernement civil) qui a dénoncé l’absolutisme : l’homme né libre, ne peut abdiquer ses droits naturels (liberté individuelle, liberté de conscience et d’expression, d’activité économique et de propriété). Si pour l’organisation des sociétés et la sureté de ces droits le peuple délègue le pouvoir qui est sien, à des personnes choisies par lui et pour une durée convenue, il peut à tout moment mettre fin au mandat octroyé si ses droits sont menacés par ceux à qui il a confié le pouvoir.
Au XVII° siècle l’Angleterre a été le théâtre de la lutte ouverte entre deux partis, les Tories, partisans de l’absolutisme royal des Stuart, à l’image de la France de Louis XIV, et les Whigs, parlementaristes, incarnant une nouvelle société issue du commerce, manifestation du libre exercice des droits naturels. La révolution régicide de Cromwell fut suivie quarante ans plus tard en 1688 de ce que les anglais ont appelé « la bienheureuse révolution » car c’est sans effusion de sang que le roi Guillaume III (d’Orange), appelé par le Parlement à remplacer les Stuart, a ratifié en janvier 1689 le « Bill of Rights », renonçant ainsi à la prérogative royale d’imposer sa volonté .
C’est, un siècle avant la Révolution française, la naissance d’un état moderne.
Les philosophes français, principalement Jean-Jacques Rousseau (Le contrat social) et Montesquieu (De l’esprit des lois) eux-mêmes inspirés par les anglais, ont répandu cet esprit de liberté qui a imprégné la société française.
Dans les colonies américaines, l’appétit insatiable de l’Angleterre en matière fiscale et le privilège commercial du pavillon anglais, ont provoqué un mécontentement croissant. Les colonies, qui n’étaient pas représentées au parlement de Westminster, refusèrent de payer les taxes imposées, sans leur consentement, en 1765 et 1767. Les taxes en litige furent abolies en 1770, sauf celle sur le thé.
Les américains refusèrent de décharger les cargaisons de thé et, dans le port de Boston, une soixantaine de colons déguisés en indiens abordèrent trois navires et jetèrent à l’eau 45 tonnes de thé. En représailles les anglais établirent un blocus du port de Boston. La répression anglaise fit l’unité des 13 colonies. Sous l’impulsion de benjamin Franklin un premier congrès se réunit à Philadelphie en 1774.
Un second congrès réuni en 1775 choisit Georges Washington pour comandant en chef. Washington, qui avait fait l’apprentissage de la guerre 15 ans plus tôt en combattant les français, comprit rapidement la nécessité de trouver un allié, qui ne pouvait qu’être une puissance maritime, pour briser le blocus anglais. En effet les insurgents ne pouvaient compter que sur des milices mal entraînées, insuffisamment armées pour combattre les régiments anglais.
La même année, le 8 août à Metz, en garnison au régiment de Noailles, le jeune capitaine La Fayette âgé de 18 ans, dîne avec le duc de Broglie et le duc de Gloucester qui fait part du soulèvement des Insurgents américains. C’est là qu’il décide de s’engager dans l’aventure américaine. Après s’être fait réformer de l’armée il embarque clandestinement à Bordeaux au printemps 1777 avec une cargaison d’armes financée par Beaumarchais et Sileas Dean, l’émissaire qui l’avait recruté à Paris fin 1776. A son arrivée, Washington le nomme major-général de l’armée des insurgés. Il a 19 ans.
Le 4 juillet 1776 les 13 colonies déclarent leur indépendance. Thomas Jefferson est le principal rédacteur de la Déclaration d’indépendance. L’engagement de Lafayette, gendre du Duc de Noailles, au côté des américains, engage un peu la France dans la guerre d’indépendance ; ce qui n’est pas pour déplaire à Benjamin Franklin, ambassadeur des Etats-Unis.
A Paris le Comte Charles de Vergennes, ministre des affaires étrangères du roi Louis XVI signe avec Benjamin Franklin, le 6 février 1778, un traité d’amitié et de commerce, assorti d’un traité secret d’alliance qui fait de la France le plus ancien allié des Etats-Unis. C’est une chose que nous ne devons pas ignorer.
Rentré en France, Lafayette œuvre pour l’engagement de la France qui envoie en 1780 navires de ligne et troupes sous le commandement de l’Amiral de Grasse et du Maréchal de Rochambeau. Lafayette repart sur l’Hermione. En 1781, la flotte anglaise est anéantie dans la baie de Chesapeake et les troupes anglaises sont défaites à Yorktown, bataille dans laquelle s’illustre Lafayette.
Rappelons aussi que, si Lafayette reste la figure emblématique de la guerre d’indépendance et de l’amitié franco-américaine, le véritable artisan en fut Charles de Vergennes, personnage oublié du public sinon de l’Histoire.
Enfin pour conclure, rappelons simplement que le mouvement se poursuit en France en 1789, 6 ans après l’indépendance américaine, jusqu’aux mouvements de libération des colonies de l’Amérique centrale, Haïti en 1804, et sud-américaines, Miranda, Bolivar au XIX° siècle. Ainsi apparait, en dépit des écueils, l’unité profonde du monde atlantique.